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Disséquons 2009
Disséquons 2009
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22 février 2009

France : pays des droits de l’Homme ?

« Pourquoi ce que les politiciens et la presse asservie des pays occidentaux appellent le « problème de l’immigration » est il devenus, dans tout les pays concerné, une donnée fondamentale de la politique des Etats ? Parce que tout ces étrangers qui arrivent, qui vivent et Qui travaillent ici sont la preuve que la thèse de l’unité démocratique du monde réalisé par le marché et par la « communauté internationale » est fausse. Si elle était vraie, nous devrions accueillir ces « étrangers » comme des gens du même monde que nous ».

Alain Badiou

 

 

La loi du marché se trouve actuellement au cœur des politiques menées aussi bien par les grandes instances internationales, telles que l’UE, la Banque Mondiale ou encore l’OMC, que par les états. Ces derniers sont contraints, même s’ils adhèrent à cette idéologie dominante, de déréguler les marchés financiers en supprimant toute entrave à la libre circulation des biens, des services et surtout des capitaux. Paradoxalement, la libre circulation des individus est de plus en plus menacée. Cet état de fait peut s’expliquer par différents facteurs. La fermeture des frontières permet de préserver une enclave dite « développée » qui permet d’asseoir un sentiment de satisfaction d’être né du « bon côté » de la barrière. Ces « privilégiés », persuadés que leur sort leur est envié par le reste du monde et que l’invasion est éminente, se réfugient derrière un repli nationaliste et des barrières législatives. L’Europe-Forteresse prend racine au cœur de cet imaginaire.

Ce qu’on appelle aujourd’hui le « problème de l’immigration » n’est en fait ni plus ni moins que la reprise de la bonne vielle thématique de l’ennemi intérieur qui a tour à tour été juif puis communiste au cours du XXème s. Aujourd’hui le débat se cristallise autour de problématiques montrées du doigt par le gouvernement, ce qui a pour effet, d’une part de créer une peur des « étrangers » et de leur afflux massif et d’autre part de les faire passer pour les responsables des maux actuels de notre société. Les immigrés deviennent ainsi des sangsues de toutes « nos » aides sociales, mais sont également ceux qui « volent le travail (ou le logement) du vrai français ! ».

 

Alors que les migrations en direction de l’Europe ne représentent que 4% des migrations mondiales, les discours de nos gouvernements tendent à nous faire croire, d’une part que des pays comme la France sont envahis par une immigration massive mais également que la seule manière d’empêcher un afflux plus massif est de durcir les politiques de contrôle des migrations. Face à de tels assertions il peut être utile de rappeler que la France est depuis plus de 25 ans le pays européen dont la croissance démographique dépend le moins de l’immigration.

Lors du dernier rassemblement organisé par RUSF (Réseau Université Sans Frontières) le 9 février, il a été possible à travers l’envoi d’une délégation à la préfecture, d’être confronté à l’argumentaire du pouvoir institutionnel, incarné ce jour là par un représentant du préfet. Face à des récits de vie de personnes qui ont été poussé à la migration avec ce que cela comporte de souffrances et de traumatismes, la seule réponse officielle est que l’ « on ne peut pas accueillir toute la misère du monde ». La misère du monde renvoyant implicitement à l’idée reçue qui veut que les migrants soient « des pauvres » en provenance des pays du sud, sorte de fourre tout où les catégories de migrations politiques, de migrations économiques et familiales seraient confondues.

 

Les critères retenus par l’institution ici, pour juger de la recevabilité des demandes de titres de séjours, sont donc clairement subjectifs (il existe bien des lois, mais ces dernière ont l’inconvénient de ne pas prendre en compte les aspects moraux et surtout humains de ces cas, se limitant aux catégories prévues par la législation). Cette subjectivité est relayée dans toutes les strates de la société, du tribunal à la préfecture, en passant par les médias. Par exemple, on peut entendre au Tribunal des aberrations du genre « votre femme n’étend enceinte que depuis 3 mois, on ne peut pas dire que l’enfant ait besoin de son père » ou encore « cet individus est dangereux pour la société française » (en effet, il a purgé une peine de 11 mois pour avoir travaillé avec de faux papiers !)… C’est ce type de discours qui normalise des jugements de valeurs, et leur donne un caractère prétendument universel (ce qui est bien entendus faux et prétentieux). La subjectivité se retrouve également dans l’interprétation et dans l’application de ces même lois : en effet, une personne sans papiers soutenu par un diplomate influent s’est vu attribuer à titre exceptionnel un titre de séjour grâce à sa condition (ou plutôt celui qui a intercédé en sa faveur) ! 

 

 

Au vue de ces constats, on peut affirmer que ces discours et pratiques, s’opposent à l’idée très rependue qui voudrait que la France soit une terre d’asile, le pays des droits de l’homme. Ce n’est pas un Etat de droit que d’identifier les gens à travers leurs papiers. Ce n’est pas respecter la dignité humaine que de rafler à domicile, que d’aller jusqu’à enfermer des enfants dans des  centres de rétentions.

 

Ces pratiques sont rattachées à un vocabulaire précis, qui est lui-même rattaché à un imaginaire collectif basé sur la peur de l’autre et de l’immigration. Il faut questionner les connotations implicites de ces termes :

 

- immigration : la personne « immigrée », c’est celle qui vient d’ailleurs, de loin, du sud, pour profiter des conditions de vie ici. On l’associe la plupart du temps aux déplacements de populations pauvres, qui fuient, parfois clandestinement, leur pays d’origine. Elles transmettront malgré elles, leur statut discriminant à leur descendance ; on parlera alors d’immigrés de la deuxième ou de la troisième génération. Ces immigrés seraient là pour « voler le travail » (des nationaux), contrairement aux migrations entre pays Européens et plus largement entre les pays industrialisés, qui seraient là pour « créer le travail » ou au moins participer à l’essor économique national. Une autre catégorie a été crée ainsi lorsque l’on a voulu donner une connotation positive à l’immigration : l’immigration choisie. Ce concept impose une relation de domination forte de l’Etat sur l’individu, puisqu’il ne s’agit que de sélectionner un immigré qu’en fonction d’un métier et/ou statut dans la mesure où il pourra combler un manque sur le territoire d’accueil (et donc être utile aux intérêts économiques), sans pour autant s’intéresser à la personne en tant qu’individu.

 

- étrangers : parler d’étranger est le fait d’exacerber les différences entre les individus, de les présenter comme « autre ». Ce statut d’« autre » n’est pas dû à ce qu’est l’individu en tant que tel mais à son absence de pouvoir, dans le sens où la personne ne peut répliquer sur un même pied d’égalité puisqu’elle se trouve dans une position minoritaire, et ne parviendra donc pas à se faire accepter dans ce qui est considéré comme la norme. Ce procédé d’oppression se base sur la même rhétorique que ce soit au sujet des étrangers, des femmes ou encore d’autres groupes marginalisés. La façon de faire du groupe dominant n’est pas présentée comme un comportement parmi tant d’autres, mais comme LA norme. Les différences sont ainsi créées par le groupe dominant et apparaissent comme autant de signes du refus de s’intégrer des personnes stigmatisées. C’est en fait une manière de faire culpabiliser la personne, quant à ses différences vis-à-vis du groupe.

 

- sans papiers : ils sont considérés comme des gens à qui il manque quelque chose. C’est vrai, il leur manque la reconnaissance de l’Etat qui passe par l’octroi d’un statut administratif. La faute leur est mise dessus alors qu’il ne faut pas oublier que c’est l’Etat qui les place dans cette situation.

 

 Ces termes sont des marqueurs de l’évolution des mentalités au sein de la population française et sont largement instrumentalisés, diffusés et banalisés par les instances étatiques et médiatiques. Ils sont tellement repris qu’ils paraissent aujourd’hui neutres dans le langage commun, si bien qu’on a l’impression qu’ils représentent une réalité objective. Cependant, il ne faut pas oublier que ces termes sont le résultat de volontés politiques et idéologiques. Ces volontés sont les mêmes qui créent des lois de plus en plus répressives et sélectives vis-à-vis de l’immigration.


 

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